Fabienne Brugère, philosophe : Les disputes, l’ennui et le silence sont des signes de désamour

La rupture amoureuse est souvent perçue comme un échec ou une fin tragique. Pourtant, selon Fabienne Brugère, philosophe, elle représente également un processus de transformation personnelle et relationnelle. Dans son ouvrage Désaimer – Manuel d’un retour à la vie, elle explore la notion de désamour, un concept rarement abordé par les philosophes, mais qui est pourtant une étape incontournable de toute relation amoureuse.

La rupture, une épreuve complexe à nommer

Depuis l’Antiquité, les penseurs ont traité de l’amour sous diverses formes, mais peu se sont penchés sur l’inversion de cet amour, c’est-à-dire le désamour. Pour Fabienne Brugère, ce phénomène, qu’il soit choisi ou subi, constitue une épreuve extrêmement difficile à traverser. « On parle souvent de la souffrance de la rupture, mais rarement de la souffrance de celui qui désaime », explique-t-elle. En effet, le désamour engendre des sentiments contradictoires, entre chagrin, culpabilité et colère. Ces émotions rendent souvent la discussion autour du désamour complexe et évitée.

Selon elle, le fait d’aborder ce sujet est essentiel pour permettre aux individus de traverser cette phase et de se reconstruire. Pour comprendre et appréhender cette épreuve, il est crucial de pouvoir identifier les signes avant-coureurs du désamour.

Les signes avant-coureurs du désamour

La philosophe insiste sur trois grands indicateurs qui marquent l’entrée dans cette phase de désengagement émotionnel dans une relation : la dispute, l’ennui et le silence.

La dispute

Les disputes répétées, sans issue constructive, sont l’un des premiers signes de désamour. Selon Brugère, quand les conflits deviennent incessants et que le dialogue se perd, il est souvent trop tard pour que les deux partenaires retrouvent une véritable connexion émotionnelle. La dispute révèle la fracture intérieure entre les deux individus, et souvent, il devient plus difficile de trouver un terrain d’entente.

L’ennui

L’ennui est un autre indicateur crucial du désamour. Dans une relation saine, la complicité et le partage de moments de qualité devraient occuper une place centrale. Mais lorsque l’ennui s’installe, il est le signe que les intérêts et les désirs ont disparu. Brugère met en lumière le fait que, paradoxalement, l’ennui ne résulte pas nécessairement d’un manque d’activité, mais d’une absence de sens dans les interactions quotidiennes.

Le silence

Enfin, le silence est peut-être le signe le plus poignant du désamour. Ce n’est pas seulement l’absence de parole, mais une détérioration de la communication émotionnelle. Lorsque les échanges deviennent rares, les conversations superficielles et les moments de partage authentique se font de plus en plus rares, cela reflète une profonde désaffection entre les deux partenaires.

Se reconstruire après la rupture

Pour Fabienne Brugère, comprendre ces signes est essentiel pour mieux gérer la rupture et le retour à la vie. En prenant conscience de ces indicateurs, il devient possible de comprendre le processus de désamour, d’accepter ses émotions et de commencer à reconstruire sa vie, seul ou dans une nouvelle dynamique.

À travers cet ouvrage, la philosophe nous invite à voir le désamour non pas comme une fatalité, mais comme une opportunité de renaissance personnelle et de réajustement de notre rapport aux autres et au monde.

En définitive, désaimer, c’est aussi se réconcilier avec soi-même et avec la vie après une épreuve amoureuse.